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Sécurité / Défense
Europe

La politique de défense européenne : quelle autonomie pour l’UE ?

Laurent Bansept

Chercheur au Centre des Études de Sécurité de l'Ifri

La notion d’autonomie stratégique européenne, largement portée par la France, vise à faire de l’Europe un acteur stratégique crédible, équipé et apte à assumer des responsabilités globales. Ce concept suscite des réticences, en particulier parmi les Européens ayant longtemps désinvesti le domaine de la défense, déléguant largement cette responsabilité à l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN). Certains États (d’Europe centrale et orientale) voient dans le projet d’autonomie un risque d’affaiblissement de la relation de sécurité avec les États-Unis, tandis que d’autres (Autriche, Irlande) craignent une atteinte à leur politique de neutralité.

Faire converger les vues d’une trentaine de pays géographiquement, historiquement et politiquement aussi différents est indéniablement un défi. Le conflit en Ukraine devrait conduire à un « réveil stratégique » de nos partenaires européens. Le « partage du fardeau », légitimement appelé par Washington, deviendra indispensable pour que l’Europe puisse durablement agir, de manière déterminée, et contribuer directement à sa sécurité. Sa capacité à contrer des menaces de plus en plus complexes et à défendre efficacement le droit, les valeurs démocratiques ainsi que la liberté d’accès aux espaces communs, dans un contexte de confrontation militaire dans son voisinage immédiat, en dépendra.

L’Europe sur la voie du réveil stratégique

La montée des périls ressentie fortement depuis 2014 aussi bien à l’Est qu’au Sud – sous le double effet de la crise ukrainienne et de la menace terroriste – a suscité un début de prise de conscience. Une réelle dynamique s’est engagée au niveau de l’Union européenne (UE) après une décennie sans avancée majeure en matière de défense et de sécurité. Sur le plan politique, plusieurs nouveaux instruments ont été créés : la Coopération structurée permanente (CSP) vise à conduire des projets de défense en cercle restreint (participation volontaire des États membres) permettant de se libérer des contraintes des décisions à l’unanimité. Au niveau capacitaire, le Fonds européen de défense (FED), doté de 8 milliards d’euros pour la période 2021-2027, contribue à l’émergence d’une base industrielle et technologique de défense européenne. Sur le plan opérationnel enfin, la Facilité européenne pour la paix (FEP) permet depuis 2021 la fourniture d’équipements militaires (y compris létaux) aux armées partenaires.

Mais l’UE n’est pas le seul cadre dans lequel une autonomie stratégique européenne se construit :

  • la France, rejointe par 12 autres nations, a lancé en 2017 l’Initiative européenne d’intervention qui vise à renforcer la capacité à agir ensemble en opérations ;
  • des programmes bilatéraux ou trilatéraux (avion de combat SCAF, char MGCS) ou des décisions emblématiques (choix grec et croate du Rafale) dynamisent la coopération industrielle ;
  • sur le terrain enfin, la force de contre-terrorisme Takuba au Sahel (avec neuf États) et l’opération EMASoH de surveillance maritime dans le golfe arabo-persique (avec huit nations) ont constitué des marqueurs forts de la volonté de certains pays de s’engager dans la gestion des crises lointaines.

Le choc de l’invasion de l’Ukraine

L’opération lancée en Ukraine par Vladimir Poutine le 24 février 2022 bouleverse à l’évidence le tempo de cette lente construction. Ce retour fracassant de la guerre sur le continent européen a contraint l’UE, et plusieurs de ses membres, à lever le tabou de l’exercice de la puissance militaire. Témoin le plus marquant, la décision de livrer massivement des armes à l’Ukraine que ce soit par l’UE (via la FEP) ou à titre national par des États jusqu’ici opposés à de telles pratiques, comme l’Allemagne ou la Suède. L’invasion de l’Ukraine fait surtout la démonstration des risques encourus par une Europe dont les gouvernements – et les peuples – semblaient souvent vouloir ignorer le fait guerrier, et impose désormais d’y répondre avec ambition.
Il est toutefois encore trop tôt pour déterminer l’impact exact de ce conflit sur la construction d’une politique européenne de défense dotée d’une certaine autonomie. Symboliquement, le ralliement de l’Allemagne à l’objectif des 2 % de produit intérieur brut (PIB) consacrés à la défense – accompagné d’un investissement de 100 milliards d’euros –, l’annonce d’un objectif à 3 % pour la Pologne en 2023 ou encore celle d’un référendum au Danemark sur la fin de « l’opt out » (non-participation) à la Politique de sécurité et de défense commune (PCSD), signent une dynamique de réarmement des Européens. Mais il est aussi très vraisemblable que l’OTAN, parfois jugée moribonde, retrouve à cette occasion toute la pertinence de ses origines. Quelle articulation alors envisager entre l’Alliance et l’UE, et quelles perspectives pour une souveraineté européenne ?

L’enjeu de la « Boussole stratégique »

En 2020, les Européens ont entamé la rédaction de leur « Boussole stratégique ». Qualifié par la France de « premier Livre blanc de la défense européenne », ce document, doit renforcer la convergence des États, inciter à la résilience collective et promouvoir la souveraineté européenne, en s’assurant de disposer des capacités d’une triple autonomie : d’appréciation, de décision et d’action.

À l’aune de la guerre en Ukraine, son ambition première peut encore être renforcée. Il faut aujourd’hui, encore plus précisément qu’hier, que les États européens :

  • s’attachent à nommer et évaluer les menaces et les risques ;
  • s’assurent de disposer de structures et de moyens plus robustes, réactifs et flexibles, complémentaires avec ceux dont ils disposent à titre national ;
  • renforcent leurs dépenses et soutiennent particulièrement l’innovation et l’investissement de défense, leur permettant de rester compétitifs face à des concurrents plus agressifs ;
  • protègent efficacement leurs technologies et infrastructures critiques, et s’assurent de la diversification de leurs approvisionnements et de la relocalisation de leurs capacités stratégiques de production.

Avant même l’issue du conflit en Ukraine, l’UE doit donc poser les nouveaux termes d’un débat stratégique majeur, lui permettant d’anticiper et de s’organiser pour faire face à l’accumulation des menaces stratégiques directes ou « hybrides » qui pèsent sur ses valeurs et sa cohérence, qu’elles proviennent de compétiteurs systémiques, régionaux ou d’organisations terroristes.