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Santé
Europe
France

Les défis à venir de la santé mondiale

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Dominique Kerouedan

Fondatrice du « Groupe Afrique Covid-19 » de l’Académie nationale de médecine de France et de la spécialisation Global Health à PSIA-Sciences Po, titulaire (2012-2013) de la chaire Géopolitique de la santé mondiale au Collège de France

Le modèle de la « santé mondiale » a émergé dans les années 1990 et a modifié en profondeur la coopération sanitaire internationale. Il a toutefois échoué à maîtriser l’épidémie puis la pandémie de Covid-19. En outre, les inégalités d’accès aux services préventifs et curatifs de soins se sont largement étendues, avec des conséquences graves sur la morbidité comme sur la mortalité, notamment dans les pays les plus pauvres et pour les populations les plus vulnérables partout dans le monde.

Le discrédit du modèle de la santé mondiale

Le défi crucial auquel nous faisons face, dans l’immédiat et à plus long terme, consiste à modifier en urgence le paradigme de la coopération sanitaire internationale, à l’œuvre depuis plus de vingt ans, accompagné de son cortège de partenariats public-privé mondiaux. Ces derniers constituent de véritables banques ou instances financières, qui se sont substituées aux agences techniques de développement. En conséquence, l’aide destinée à améliorer la santé des populations des pays en développement s’est retrouvée soumise à des logiques comptables, indépendamment de toute vision stratégique. De plus, les lobbies industriels, commerciaux, pharmaceutiques ou agro-alimentaires, ont prospéré dans ce système pour y promouvoir des intérêts privés.

Près d’un quart de siècle après la création en 1998 de l’Alliance pour la vaccination et l’immunisation (l’Alliance GAVI), et en dépit des dizaines de milliards de dollars alloués à la lutte contre les maladies infectieuses, le monde fait aujourd’hui face à une épidémie à virus émergent, le SARS-CoV-2. Il s’agit d’une pandémie meurtrière, aux conséquences incalculables sur les plans de la santé physique et mentale des populations, y compris en ce qui concerne les handicaps, non encore mesurés, sans parler de ses répercussions familiales, sociales, économiques et financières.

Cette pandémie est loin d’être sous contrôle. Elle s’accélère au contraire au gré de l’apparition de nouveaux variants. De nombreux autres pathogènes circulent dans des pays et régions qui ne disposent pas d’équipements de laboratoire permettant leur séquençage et leur identification. De ces manques découle l’incapacité à développer des tests de dépistage, des nouveaux médicaments ou des vaccins efficaces à long terme.

L’Alliance GAVI avait été fondée avec le premier versement de 750 millions de dollars de la Fondation Bill and Melinda Gates. Quatre ans plus tard, avait été créé le Fonds mondial de lutte contre le VIH/sida, la tuberculose et le paludisme, un partenariat public-privé focalisé sur seulement trois maladies. La pandémie de Covid-19 signe l’échec de cette stratégie ciblée et plus largement des partenariats public-privé. Le modèle de la santé mondiale est aujourd’hui discrédité.

Les dérives de la privatisation des politiques de santé

L’une des raisons de cet échec est à rechercher dans l’accaparement de la décision politique par des dirigeants du secteur privé qui ne s’en sont pas tenus à leur mandat initial de partenaire-financeur. Le processus d’élaboration de politiques censées relever du secteur public a ainsi échappé aux parlements et autres instances démocratiques comme l’Assemblée mondiale des ministres de la Santé des États membres de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). L’architecture de la coopération sanitaire mondiale s’est transformée au tournant des années 2000, non pas en santé mondiale en faveur de la collectivité, mais en santé privatisée au service des intérêts des personnes les plus riches du monde.

La méconnaissance du terrain, de ses métamorphoses socio-démographiques urbaines et rurales fulgurantes, rend complexe l’appréhension du réel par des chercheurs basés au Nord. Quant à leurs collègues du Sud, ils travaillent souvent dans des institutions de recherche ou des universités dépourvues de soutiens, et dont les savoirs et les connaissances ne sont pas écoutés par leurs interlocuteurs politiques ici ou là-bas. En outre, les conflits armés et la progression du terrorisme islamiste ne facilitent pas la détection précoce de phénomènes sanitaires nouveaux. Ils compromettent une riposte d’envergure, dont la vaccination de l’ensemble des populations. Ces dernières sont d’ailleurs de plus en plus jeunes, de moins en moins nourries, éduquées, soignées, et socialement protégées.

Replacer l’État au cœur des systèmes de santé

À l’avenir, pour parer à une nouvelle pandémie, nous devons commencer par reconnaître l’échec du modèle de la santé mondiale tel qu’il continue d’opérer en dépit de ses multiples défaillances. Les gouvernements des pays en développement doivent accorder davantage d’intérêt à la santé de leurs citoyens, dont ils sont censés assurer la sécurité. À l’heure actuelle, seul un pays du continent africain a atteint l’objectif d’Abuja, fixé en 2001, d’affecter au moins 15 % des budgets publics au secteur de la santé. Du côté des États de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), la part de l’aide publique au développement consacrée aux systèmes sanitaires – dont la surveillance épidémiologique et l’alerte constituent le premier pilier – est misérable. À l’évidence, la santé n’est pas une priorité politique.

Le concept de santé mondiale visait à détecter le plus tôt possible un phénomène de santé émergent à l’autre bout de la planète. Son objectif principal – assurer la sécurité sanitaire mondiale – a été manqué, ce qui n’est pas le moindre des paradoxes. Il faut désormais rebâtir son architecture et sa gouvernance, en replaçant l’État – dont la fonction première est de garantir la sécurité des populations – au centre du dispositif. Pour faire face aux défis sanitaires d’aujourd’hui et de demain, la santé publique doit enfin être considérée comme une fonction régalienne.