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Chine/États-Unis : l'Europe en déséquilibre

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Sécurité des approvisionnements énergétiques : la volonté chinoise de maîtriser ses dépendances

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Sécurité des approvisionnements énergétiques : la volonté chinoise de maîtriser ses dépendances

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Marc-Antoine Eyl-Mazzega

Directeur du Centre Énergie & Climat de l'Ifri

La position de super-puissance énergétique des États-Unis est sans commune mesure avec celle de la Chine. Cette dernière est le premier importateur mondial de pétrole avec plus de 10,1 millions de barils/jour [mb/j] en 2022, un rebond étant attendu en 2023. Elle est en outre au coude-à-coude avec le Japon pour la place de premier importateur mondial de gaz naturel liquéfié (GNL). La Chine dépend ainsi très fortement de l'étranger pour ses approvisionnements. Mais elle dispose d'atouts et d'une stratégie.

Premier atout : elle est un producteur significatif de gaz, avec plus de 220 milliards de mètres cubes par an (Gm3/an), et de pétrole, avec 4 mb/j. La hausse de sa production intérieure facilite l’essor du gaz dans le mix énergétique.

Deuxième atout majeur : ses importantes ressources en charbon, qui lui permettent de réguler sa demande de gaz en fonction des contraintes géopolitiques, sociales et économiques. Alors que la Chine voyait sa demande intérieure de gaz augmenter tous les ans de l'équivalent de la consommation annuelle de la France, elle a bloqué la hausse de sa demande en 2022 et fait baisser fortement ses importations de GNL en relançant le charbon, au grand bénéfice des Européens. Le charbon lui permet aussi de palier la flexibilité de sa production hydroélectrique.

**La stratégie chinoise de sécurité d’approvisionnement en gaz **

Pékin veut limiter sa dépendance aux importations gazières à environ 50%. Face aux risques géopolitiques, techniques (accès au GNL réduit ou bloqué) ou économiques (prix très élevés), la Chine peut limiter sa demande de gaz en relançant le charbon, notamment dans le secteur électrique ou industriel, en réduisant le chauffage ou l'activité industrielle.
A l'extérieur, la Chine multiplie les sources d'approvisionnement par gazoducs (Asie centrale, Russie, Birmanie) ou via le GNL, mais n'a pris que quelques participations dans des projets (comme en Russie).

Elle importe déjà du gaz naturel liquéfié des Etats-Unis et n'hésite pas à signer énormément de contrats d'approvisionnement de long terme avec des fournisseurs américains. Ces importations étaient d'ailleurs prévues dans les accords de rééquilibrage commerciaux conclus sous la présidence Trump. Elles peuvent constituer une aubaine pour la Chine, à condition qu'il y ait d'autres options, comme le Qatar, qui est un fournisseur significatif avec lequel un nouveau contrat majeur a été conclu récemment. Ainsi, en 2021 et 2022, environ la moitié des nouveaux volumes sécurisés par la Chine sur le long terme l'ont été avec des développeurs de projets américains, tandis que l'Australie, grand allié des Etats-Unis, est déjà son premier fournisseur.

La Chine cherche à maîtriser cette dépendance et semble prête à surdimensionner ses importations de gaz pour faire face à tous les aléas. Enfin, ce surdimensionnement potentiel des importations pourra être renforcé si la Chine ralentit la croissance de sa demande, parvient à renforcer encore sa production intérieure, ou signe de nouveaux contrats avec la Russie, prélude à de nouvelles infrastructures.

Pour l'Europe, cela signifie que la Chine pourrait être en mesure de devenir l'un de ses premiers fournisseurs de GNL à l'avenir ! Dans certaines circonstances, les acheteurs chinois pourront revendre aux Européens des cargaisons américaines, empochant d'importantes marges. Ce cas de figure a d’ailleurs été observé dès 2022. A terme, la Chine pourrait bien chercher à importer un maximum de GNL américain lorsque le prix est bas, et en revendre à l'Europe lorsqu'il est élevé. Cependant, les capacités de stockage chinoises (équivalentes à 7-8% de la demande du pays) sont relativement faibles et font figure de talon d’Achille.

Les approvisionnements pétroliers

Dans le secteur pétrolier, la stratégie de Pékin vise à limiter puis réduire sa consommation intérieure, grâce notamment à l’essor de la mobilité électrique, et à diversifier les approvisionnements, sachant que les sociétés étatiques chinoises ont peu de participations dans de grands projets à l'étranger. La Chine a beaucoup profité de la guerre en Ukraine et des réductions sur certaines fournitures russes en 2022 et 2023. Là encore, elle n'a pas hésité à faciliter le ré-export de produits pétroliers, y compris vers l'Europe, ouvrant d'importants quotas pour ces opérations très profitables. Enfin, elle s'est dotée de stocks stratégiques importants.

La Chine a un intérêt primordial à ce que le Moyen-Orient soit stable, d'où le double partenariat avec l'Iran et l'Arabie saoudite. Prudente, elle ne s'engage pas dans des prises de participation nouvelles en Russie étant donné les contraintes liées aux sanctions. Moscou n'a toutefois jamais voulu lui céder le contrôle d'actifs énergétiques. Plus la Russie s'affaiblit, meilleures sont les opportunités pour la Chine dans ce domaine, avec une limite : la Russie ne doit pas s’effondrer.

La rivalité sino-américaine dans le domaine nucléaire

Par ailleurs, la rivalité sino-américaine se déroule dans le domaine du nucléaire civil, les Etats-Unis cherchant à contrecarrer tous les projets à l'export de la Chine, accusée d'avoir volé des technologies américaines. Washington a aussi une politique visant à remplacer et interdire des équipements chinois dans ses systèmes électriques critiques, et entend développer une industrie domestique des technologies bas carbone. Pour les Européens, le défi est lié au constat que l’accélération de la transition énergétique pose un défi industriel immense. En outre, bon nombre d’équipements dans les systèmes électriques et industriels sont chinois, sans compter les métaux. Enfin, si les Européens ne parviennent pas à mettre fin à leurs contentieux idéologiques sur le nucléaire et l’hydrogène, la Chine, les Etats-Unis, mais aussi le Japon et la Corée du sud – tous pragmatiques –, en tireront profit, et ce de manière irréversible.

Recommandations pour l’Union européenne

Dans ce contexte, la Commission européenne devrait développer une nouvelle stratégie gazière adaptée à l'accélération de la transition énergétique européenne, qui établisse une trajectoire de demande réaliste avec différents scénarios intégrant les besoins d’importation afférents. En outre, face aux vulnérabilités dans les hydrocarbures, une politique industrielle renforcée et simplifiée pour les technologies bas carbone – notamment la flexibilité du système électrique et la substitution du gaz naturel dans l’industrie –, paraît indispensable, tout comme la recherche urgente de solutions pour surmonter les tensions fratricides liées au nucléaire ou à l’hydrogène qui affaiblissent l’Europe.

Recommandation opérationnelle

Face aux vulnérabilités dans les hydrocarbures, une politique industrielle renforcée et simplifiée pour les technologies bas carbone, paraît indispensable, tout comme la recherche urgente de solutions pour surmonter les tensions fratricides liées au nucléaire ou à l’hydrogène qui affaiblissent l’Europe.

Chiffres clés

En 2021 et 2022, environ 50% des nouveaux volumes du GNL sécurisés par la Chine sur le long terme l'ont été avec des développeurs de projets américains, tandis que l'Australie, grand allié des Etats-Unis, est déjà son premier fournisseur.