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Chine–États-Unis : la course à l’espace

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Marc Julienne

Responsable des activités Chine au Centre Asie de l'Ifri

La compétition protéiforme entre la Chine et les États-Unis sur Terre se reflète aussi dans l’espace. Composante indispensable de toute grande puissance, le programme spatial permet à l’État d’acquérir le prestige lié au savoir-faire technologique et à l’excellence scientifique, de bénéficier du développement économique et social qu’offrent les applications civiles, et de renforcer la défense nationale par les applications militaires. Dans sa quête de puissance, la Chine conçoit l’espace comme un secteur de rattrapage, tandis que les États-Unis entendent conserver leur avance. La Russie, pour sa part, première puissance spatiale de l’histoire, se trouve aujourd’hui marginalisée dans cette course. Elle se positionne résolument du côté de Pékin, mais apparaît comme un acteur secondaire. L’industrie spatiale russe est en effet dans un état de déliquescence, aggravé par la guerre d’Ukraine.

La compétition sino-américaine dans l’espace se mène tous azimuts, mais trois domaines apparaissent particulièrement déterminants : la course à la Lune, les stations spatiales en orbite basse et les constellations internet.

Course à la Lune

La course à la Lune opposait dans les années 1960 les Américains aux Soviétiques. Elle met aujourd’hui aux prises Washington et Pékin. Chacun a annoncé des ambitions et un calendrier relativement similaires.

L’objectif de part et d’autre est de construire une base permanente et habitée à la surface de la Lune, afin d’en exploiter les ressources et de constituer ultérieurement un port spatial vers Mars.

Les deux programmes concurrents se présentent comme internationaux. Le programme lunaire américain, Artemis, est ouvert à la coopération à travers les accords éponymes, signés par 23 États, dont plusieurs membres de l’Union européenne : la France, l’Italie, le Luxembourg, la Pologne et la Roumanie. Son concurrent l’International Lunar Research Station (ILRS) est un programme conjoint entre la Chine et la Russie et ouvert au reste du monde, bien qu’aucun autre partenaire ne soit pour le moment connu. Toutefois, le contexte dans lequel se trouve la Russie est de nature à menacer la viabilité du projet. En effet, l’isolement de Moscou sur la scène internationale pourrait dissuader de potentiels candidats, tandis que sa vulnérabilité financière et technologique liée aux sanctions pourrait remettre en question sa capacité à honorer ses engagements. Pékin entend cependant atteindre ses objectifs, avec ou sans la Russie.

La course ne fait que débuter, mais, pour l’heure, les Américains disposent d’un avantage certain, du fait de leur expérience et leur avance technique, notamment grâce au Space Launch System (SLS), le plus puissant lanceur actuellement disponible, développé par la NASA et testé avec succès en novembre 2022. En Chine, le lanceur Long March 9, envisagé pour le programme lunaire, est attendu pour 2030 au plus tôt. Les États-Unis bénéficient en outre d’un large réseau de partenaires internationaux qui apportent un soutien technique et politique.

Station spatiale

Plus proche de nous, dans l’orbite basse terrestre, la Chine émerge comme un acteur scientifique de premier plan avec sa station spatiale Tiangong 3, dont l’assemblage a été achevé à l’automne 2022. Pékin dispose désormais d’un laboratoire scientifique spatial, habité en permanence. Celui-ci reste quatre fois moins massif que la Station spatiale internationale (environ 100 tonnes, contre 420), mais pourrait devenir le seul laboratoire en orbite basse, au vu de l’avenir incertain de l’ISS qui pourrait être désorbitée ou confiée au secteur privé dans les années à venir. Cet hypothétique futur monopole chinois est cependant à nuancer puisque, pour les Américains, l’objectif est l’orbite circumlunaire.

Constellation internet en orbite basse

Parmi les nombreuses applications spatiales que l’on utilise sur Terre, les constellations internet en orbite basse sont porteuses de promesses autant en matière de retombées civiles et militaires, que de potentiel commercial. Dans ce domaine, les Américains disposent d’une large avance grâce à la constellation Starlink d’Elon Musk, qui compte actuellement environ 4 000 satellites opérationnels en orbite. Starlink a aussi fait ses preuves sur un théâtre de conflit en fournissant aux Ukrainiens un système de télécommunication résilient.

La Chine, quant à elle, accuse un certain retard, mais elle met son industrie en ordre de bataille pour se positionner sur ce marché et éventuellement concurrencer Starlink. En mai 2021, une entreprise d’État a
été créée par le gouvernement chinois – China SatNet – pour développer et opérer la future constellation nommée Guowang. La Chine a obtenu l’autorisation de l’Union internationale des télécommunications pour le
placement en orbite de 12 992 satellites, soit environ 1 000 de plus que Starlink. Elle pourrait lancer ses premiers satellites entre 2023 et 2025, bien que les autorités chinoises restent discrètes sur leur calendrier et leurs ambitions.

L’Europe dans la compétition spatiale

L’Europe demeure un acteur spatial important sur la scène mondiale, mais elle fait face à des défis majeurs : des moyens limités, une concurrence acharnée, des ambitions incertaines, et la polarisation géopolitique qui
s’accentue entre la Chine et les États-Unis. Dans ce contexte de polarisation, l’Europe, traditionnellement ouverte à la coopération avec l’ensemble des acteurs du secteur spatial, devra revoir ses partenariats.
C’est déjà le cas avec la Russie et la Chine pose désormais question. Les États-Unis prennent la place de partenaire privilégié, bien que l’approche unilatéraliste de la gouvernance de l’espace promue par Washington entre en contradiction avec le modèle multilatéral défendu en Europe.

Pour conserver sa place de puissance spatiale, mais aussi sa capacité à peser et à promouvoir sa propre vision de la gouvernance spatiale, l’Europe doit impérativement préserver et renforcer son autonomie dans l’accès à l’espace, les capacités de surveillance et de suivi, l’observation de la Terre et les télécommunications basées dans l’espace.