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Chine/États-Unis : l'Europe en déséquilibre

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Le Moyen-Orient face à la compétition sino-américaine

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Jean-Loup SAMAAN

Chercheur associé au Programme Turquie contemporaine et Moyen-Orient de l'Ifri

En mars 2023, la Chine annonce, à la surprise générale, avoir obtenu un accord de réconciliation entre l’Arabie Saoudite et l’Iran. Cette médiation inédite de Pékin au Moyen-Orient a soudain dévoilé les ambitions chinoises dans la région. Elle signale aussi, et surtout, l’extension de la « une guerre froide » entre Pékin et Washington au Moyen-Orient. Jusqu’ici, la région avait semblé épargnée par la compétition sino-américaine : celle-ci concernait d’abord l’Asie. La Chine pouvait tisser des liens économiques et politiques avec les partenaires les plus proches de Washington, qu’il s’agisse des pays du Golfe ou d’Israël.
Néanmoins, la dégradation de la relation Washington-Pékin sous la présidence Trump puis celle de Joe Biden conduit les dirigeants américains à tolérer de moins en moins cette expansion chinoise dans la région et à sommer leurs interlocuteurs sur place de faire un choix.

L’expansion chinoise au Moyen-Orient

Au cours de la décennie 2010, les échanges entre le Moyen-Orient et la Chine n’ont cessé d’augmenter. La croissance chinoise s’appuie sur une forte consommation en hydrocarbures et les pays arabes représentent près de 50% des importations pétrolières de Pékin, l’Arabie Saoudite en étant la première source. Avec l’arrivée de Xi Jinping au pouvoir en 2013, et le lancement de ses « nouvelles routes de la soie », un nouvel élan est donné : les opérateurs chinois deviennent omniprésents dans le développement des infrastructures de la région. Cosco contrôle désormais 90% des terminaux de containers dans le port d’Abu Dhabi. Les capitaux chinois affluent également vers Duqm, petit port du sultanat d’Oman ouvrant sur la mer d’Arabie. En Israël, une bonne partie des infrastructures locales est développée avec des sociétés chinoises : du tunnel du Carmel à la ligne ferroviaire Akko-Karmiel, en passant par les ports d’Ashdod et Haïfa.
Pékin accorde par ailleurs une grande importance au secteur numérique : Huawei a ouvert en 2004 un centre de recherche et développement en Israël et a racheté plusieurs grands groupes de cybersécurité israéliens (Oga Network et Hexa Tier). Huawei assure également le déploiement du réseau 5G à l’ensemble des pays du Conseil de Coopération du Golfe.

Si ce rapprochement semble à première vue guidé par des considérations économiques, il n’est désormais plus dénué de motivations stratégiques. Dans le domaine militaire, la Chine reste un acteur mineur au Moyen-Orient, mais aux ambitions grandissantes, en particulier dans le Golfe. Son industrie y exporte déjà ce que les Américains ne veulent pas transférer, soit des drones armés (Arabie Saoudite, Emirats arabes unis) ou encore des missiles balistiques (Arabie Saoudite, Qatar). Abu Dhabi a par ailleurs finalisé l’achat d’une douzaine d’avions de combat légers chinois L-15 – une première dans la région.

La réaction américaine

Longtemps, les Etats-Unis ont négligé cette expansion chinoise au Moyen-Orient. Ce n’est qu’à partir de 2018, que l’administration Trump saisit l’ampleur du phénomène. Cette année-là, l’arrivée d’entités chinoises dans le port d’Haïfa inquiète l’US Navy qui menace de ne plus faire transiter ses navires sur place. Les autorités israéliennes se veulent rassurantes : en aucun cas la sécurité de la partie militaire du port ne sera compromise par la présence chinoise.

L’arrivée de Joe Biden à la Maison Blanche en janvier 2021 ne change pas la donne et au contraire amplifie les tensions entre Washington et ses alliés. Avec les Emirats arabes unis, le ton monte : à l’automne 2021, Washington dénonce ce qui s’apparente à la construction secrète d’une base militaire chinoise dans le port d’Abu Dhabi. Les négociations portant sur la vente du F-35 aux Émiriens sont alors suspendues.
Non seulement, les Etats-Unis exhortent leurs partenaires locaux à prendre leurs distances à l’égard de la Chine, mais ils les embarquent également dans de nouvelles initiatives tendant à contenir l’influence de Pékin au Moyen-Orient. En octobre 2021, voit le jour « I2U2 », un dialogue regroupant l’Inde, les Emirats, Israël et les Etats-Unis. Américains et Indiens n’hésitent pas alors à parler d’un « Quad du Moyen-Orient », en référence à l’initiative conduite en Asie par Washington. Or, la tonalité résolument anti-chinoise du « Quad » met rapidement dans l’embarras Israéliens et Émiriens qui ont à cœur de préserver leurs liens avec Pékin.
En dépit des pressions de Washington, les pays du Moyen-Orient veulent à tout prix éviter le dilemme qui s’impose à eux entre d’une part, un allié américain vital pour leur sécurité et d’autre part, un partenaire chinois incontournable pour leur prospérité. C’est pourquoi aucun de ces pays n’a pour l’instant répondu aux exigences américaines. Israël a certes ralenti ses échanges commerciaux avec la Chine depuis 2018, mais n’entend pas démanteler les contrats déjà en cours. Dans le Golfe, les stratégies varient : le Koweït et Bahreïn, les plus dépendants de l’armée américaine, ne souhaitent pas froisser Washington tandis que l’Arabie Saoudite et les Emirats arabes unis continuent d’attirer les investissements chinois. En acceptant en mars 2023 la médiation chinoise sur le dossier iranien, Riyad va même encore plus loin et signale à la Maison Blanche qu’elle ne croit plus dans le monopole du leadership américain.

Quid de l’Europe ?

Face à ce climat de « guerre froide » qui s’installe au Moyen-Orient, l’Europe est perçue par les pays de la région comme un partenaire n’imposant pas les conditionnalités américaines. En mai 2022, la mise en œuvre d’un nouveau « partenariat stratégique » de l’Union européenne avec le Golfe a été positivement accueillie dans la région. Au niveau bilatéral, le premier gagnant est la France : l’achat de 80 Rafale par les Emirats arabes unis, en pleine crise des négociations sur le F-35, n’est pas un hasard et souligne plus largement la volonté des leaders arabes de fonder une politique alternative, voire non-alignée, qui leur permette de ne pas subir les effets de la compétition sino-américaine.

Chiffre clé

Les pays arabes représentent près de 50% des importations pétrolières de Pékin. L’Arabie Saoudite à elle-seule fournit 18% des importations pétrolières chinoises en 2022.

Les économies des Etats du Golfe restent peu diversifiées. Leurs échanges commerciaux avec la Chine sont d’autant plus essentiels pour leurs économies depuis l’autonomisation énergétique des Etats-Unis. La Chine dépend quant à elle fortement du Golfe, même si les exportations pétrolières russes ont dépassé celles de l’Arabie Saoudite en 2023.

Recommandation opérationnelle pour l'Union europeénne

Face aux vulnérabilités dans les hydrocarbures, une politique industrielle renforcée et simplifiée pour les technologies bas carbone, paraît indispensable, tout comme la recherche urgente de solutions pour surmonter les tensions fratricides liées au nucléaire ou à l’hydrogène qui affaiblissent l’Europe.